CRITIQUE CINE – Sur la piste du Marsupilami

Attendu au tournant par les fans de BD, le dernier film d’Alain Chabat se devait de relever un défi qui semblait insurmontable : donner vie à l’un des personnages les plus populaires de l’univers d’André Franquin, le Marsupilami. Une idée totalement incongrue, folle, démesurée mais qui au fond n’est pas étonnant venant de cet amoureux de la BD à qui l’on devait l’excellente adaptation très personnelle d’Asterix contre Cléopâtre. Le houba n’était-il cependant pas trop gros à avaler ? Rien n’est moins sûr…

 

Depuis ma jeunesse, j’avoue être un grand fan de l’univers d’André Franquin. Des personnages de Spirou et Fantasio, il est parvenu à créer tout un univers invraisemblable et aux personnages marquants, du farfelu Comte de Champignac à l’infâme Zorglub, en passant par le cousin Zantafio et surtout sa création phare, le Marsupilami. Un animal absolument fascinant issu du génie de Franquin qui, après un album qui lui aura été consacré dans la série Spirou et Fantasio, s’émancipera totalement avec sa propre série BD durant onze album avant qu’André Franquin ne disparaisse victime d’un infarctus en 1997… Fort heureusement, notre animal mystique de Palombie continue à vivre grâce à l’excellent travail de Batem, un peu comme un hommage à l’ensemble du travail de son créateur.

Houba Hop !

Etrange animal que ce Marsupilami : mammifère appartenant à la race des marsupiaux, son pelage tacheté évoque celui du léopard. Chose incroyable, il dispose de quatre « mains » comme chez le singe et surtout d’une incroyable queue démesurée qu’il peut entièrement contrôler. Entendre par contrôler, le fait de pouvoir en faire ce qu’il veut : outil, arme, moyen de déplacement et j’en passe. Enfin, le marsupilami se montre d’une intelligence rare, capable de comprendre le langage humain et de le traduire dans sa propre langue, le « houba ». Assurément l’être imaginaire le plus fascinant qui soit qu’Alain Chabat, en grand enfant, a dû rêver de le voir en vrai. Et il faut bien avouer que la magie opère dès les premières minutes où on aperçoit la frimousse du marsupilami.

Plus vrai que nature

Ce qui est le plus étonnant et c’est l’une des réussites de ce film, c’est d’avoir réussi à transposer fidèlement l’animal en lui donnant un côté réaliste bien qu’il soit issu d’une bande dessinée. Un exploit valable pour le Marsupilami mais également pour sa compagne et ses progénitures ! On y croit vraiment en apercevant notre Marsupilami se déplacer dans la jungle amazonienne, pêcher le piranha ou encore piquer une crise noire  en bombant le torse. On ne peut que féliciter le studio en charge de la 3D et de l’animation tant la magie opère à merveille.

ASterix et Cleopatre, le retour ?

Comme beaucoup d’entre vous, j’ai encore dans la tête les images de l’adaptation très personnelle d’Asterix et Cléopâtre. Alain Chabat avait alors fait sensation par son humour dans les dialogues et son inventivité pour retranscrire la BD comme il se devait. Ce fût également le film qui aura révélé Jamel Debouze au cinéma en qualité de trublion et c’est vrai que cette formule détonante ne pouvait déboucher que sur un succès commercial. Il était donc évident qu’on allait attendre au tournant le duo Chabat / Debouze qui remettait ça dans une nouvelle adaptation de bande dessinée. Ca sentait le cassage de baraque à plein nez…

Houba Grrr !!!

… pour au final, beaucoup de bruit pour rien ! Sans trop en dévoiler sur la trame générale, le spectateur est embarqué dans une histoire de chasse au Marsupilami en pleine Palombie, avec un Alain en reporter de la loose et un Jamel en véritable guide escroc de la jungle. Entre temps, un chercheur découvre les bienfaits miraculeuse d’une fleur de jouvence dont seul le Marsupilami connaît l’existence. S’ensuit une course poursuite à qui réussira à dénicher le premier l’animal légendaire, coûte que coûte. Mais à trop vouloir en faire, Alain Chabat s’est égaré dans un scénario chaotique et superficiel. On rit bien à quelques pitreries de notre duo Alain/Jamel mais on sent manifestement que la sauce ne prend pas : les grimaces de Jamel ont plus le don d’agacer qu’autre chose et les gags d’Alain retombent comme un soufflet. Sans parler d’un Fred Testot au jeu d’acteur bien moins intouchable que celui de son illustre compère, qui pour les besoins du film a dû emprunter le vieux masque du Père Fouras de Fort Boyard dans ses pires moments. Bien mal lui en a pris !

Et pourtant, on a envie d’aimer ce film avec ses musiques envoûtantes aux chorégraphies dansantes superbes, ses décors absolument magnifiques avec des couleurs qui vous pètent littéralement au visage. Et comment ne pas citer la performance [SPOIL] de Lambert Wilson (qu’on croirait tout droit débarqué du film Jet Set) qui nous offre une scène d’anthologie de danse, habillé en Céline Dion reine du dance-floor sur « I’m Alive »… avec la bénédiction de l’original, s’il vous plaît ! [/SPOIL] Malheureusement, trop de second degré tue le second degré. Notre pauvre André Franquin doit sans doute se retourner dans sa tombe en lisant le script, avec pour seule consolation que de voir sa créature prendre vie enfin à l’écran.

Comment décrire la profonde déception suscitée par le scénario de ce film ? Si la réalisation globale se montre à la hauteur des attentes notamment concernant le point central qu’est le Marsupilami, le traitement de l’histoire semble avoir été mis totalement au second plan. Jamel et Alain Chabat ne sont ici que l’ombres d’eux-mêmes : on les avait connus sincèrement en meilleur forme. Certes, on sent que les acteurs se sont amusés à réaliser ce film et on retrouvera la patte du réalisateur dans les nombreux clins d’œil qui jalonnent le film (Tropico coco !). Mais cela ne suffit malheureusement pas pour sauver Sur la piste du Marsupilami d’un naufrage scénaristique digne du Titanic. Dommage car un tel parti pris en matière de gags aurait parfaitement collé aux aventures de Gaston Lagaffe : ici c’est raté, c’est plutôt Alain le roi de la gaffe !

 Note :

Sur la Piste d’Alain Chabat

Bande annonce Sur la piste du Marsupilami

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